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Ces Tunisiens, chrétiens ou pas fêtent Noël: Est-il facile de vivre sa chrétienté en Tunisie?

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Ils sont Tunisiens, chrétiens "de naissance" ou convertis au christianisme ou de culture musulmane et ils fêtent chaque année Noël.

Et comme chaque année, certains endroits, notamment, les centres commerciaux s'embellissent de sapins et offrent des produits ciblant une potentielle clientèle. Toutefois, au-delà de l'aspect festif, Noël est une occasion qui reflète l'état des lieux de la situation des Tunisiens chrétiens où Noël est plus qu'une simple fête.

Sirine, fête Noël avec sa famille tous les ans avec l'achat du sapin, les cadeaux et le diner, etc, "une habitude ancrée dans la famille": "Chez nous, on aime la vie, on aime les fêtes donc on fête tout ce qui est à fêter, tant que ça introduit de la beauté et de la gaieté au sein de la famille", explique-t-elle au HuffPost Tunisie.

"Je suis de culture musulmane, je fais le jeûne du ramadan, je suis croyante et je célèbre aussi bien les fêtes musulmanes que certaines fêtes chrétiennes, il n'y a aucune contradiction, d'autant plus qu'on s'astreint à l'aspect festif".

Comme Sirine, Souhir achète chaque année le sapin de Noël sans organiser un diner: "J'aurais aimé le célébrer convenablement si mon entourage était partant. Puisque ce n'est pas le cas, j'achète seulement le sapin et je prends un plaisir énorme à le décorer chaque année avec ma fille. Ceci introduit de la bonne ambiance chez moi, c'est la fin de l'année et on a besoin de cet élan joyeux".

Adoptant cet aspect festif, les sapins de Noël sont étalés dans beaucoup de centres commerciaux, Noël constitue-t-il pour autant une aubaine commerciale? Le responsable d'un grand centre commercial relativise: "Les sapins, les promotions sur les jouets, etc, ne sont pas liés spécialement à Noël mais plutôt au réveillon. Il y a certes en cette période une recrudescence au niveau de la consommation mais ça n'équivaut pas les fêtes du Mouled ou les Aid car ça touche une population minoritaire. Les Tunisiens qui célèbrent Noël ne sont pas nombreux. Quant aux expatriés à Tunis, leur nombre a baissé ces dernières années", explique-t-il au HuffPost Tunisiesous couvert d'anonymat.

L'autre réalité des Tunisiens chrétiens

"Au-delà de l'aspect festif ou commercial, Noël est pour nous chrétiens tunisiens, un grand moment de communion entre nous les fidèles, de rassemblement pour la dévotion de Dieu, de vie dans l'église", a lancé Amira (pseudonyme), au HuffPost Tunisie. Son vrai prénom est arabe, ce qui lui vaut des remarques sur son identité: "Rien dans mon apparence, physique ou autre, ne reflète ma religion, certains m'interrogent, croyant qu'un chrétien doit avoir les yeux bleus et la peau blanche et portant un prénom forcément latin, ce genre de remarques simplistes me font parfois rire, elles dénotent d'une grande méconnaissance de l'histoire où les arabes chrétiens ont été fortement présents et ont contribué au rayonnement de la civilisation arabe. Loin de m'étaler sur l'histoire, je leur réponds juste que je suis tunisienne, méditerranéenne et arabe et fière de l'être".


Amira consacre du temps aux associations caritatives "une manière de pratiquer sa foi", tout en prônant la discrétion: "Ma religion est de l'ordre de l'intime", lance-t-elle.

Éric (pseudonyme) est un Tunisien converti au christianisme. Adoptant un nom latin, il explique que Noël est avant tout "une fête spirituelle où il faut réunir les fidèles à l'église". Pour lui, non seulement il n'y a pas de différence entre les chrétiens "de naissance" et les convertis mais que "ces derniers sont plus portés par la foi que les premiers parfois".

La conversion à d'autres religions demeure un tabou en Tunisie et un péché suprême pour l'orthodoxie religieuse islamique. Face à cette hostilité comment ces personnes converties y font face? "Notre Constitution consacre la liberté de conscience et de culte mais ces principes restent des lettres mortes. Nous sommes une minorité dans une société musulmane 'par hérédité'. Nous sommes stigmatisés pour ce que nous sommes et dénigrés: certains se moquent de nous et d'autres, les plus dangereux, nous désignent comme étant des mécréants", déplore-t-il.

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Pour Mohamed Elarbi Nsiri, historien des mentalités et des religions en Afrique du Nord, ce rejet des chrétiens convertis ou pas résulte d'une peur et d'une crise identitaire sévissante dans la société tunisienne, "ces personnes dérangent parce qu'elles sont porteuses de la différence dans une société obsédée par l'apparence de l'homogénéité, ce qui la rend peu tolérante avec les minorités qu'elles soient religieuses, raciales ou autres", explique-t-il au HuffPost Tunisie.


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Le spécialiste rejette pourtant l'idée qu'il y a une politique établie par l'Etat visant l'oppression des chrétiens ou autres: "L'affaire des chrétiens arrêtés par la police à Gafsa par exemple reste un fait divers. Il est exagéré de dire que ceci émane d'une stratégie répressive de l'Etat envers eux".

Et d'ajouter: "Les chrétiens 'de naissance' sont une infime minorité en Tunisie, quant aux convertis, le travail d'intégration doit être fait dans les deux sens. Ces derniers doivent comprendre la société dans laquelle ils vivent; une personne qui porte un double prénom un latin et un arabe peut intriguer certains et la société tunisienne a du chemin à faire pour intégrer cette différence sans agressivité, les deux font face à une déchirure identitaire et doivent la dépasser", estime le spécialiste des religions.

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