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Quand les lois sur les droits des personnes handicapées peuvent être détournées

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Les textes de lois ne suffisent pas pour garantir les droits des personnes handicapées. Si la loi n'est pas respectée, il peut y avoir recours à des alternatives et il n'existe pas de sanctions. En témoigne le processus ralenti relatif à l'intégration de ces personnes dans la société ou dans le milieu professionnel .

"C'est la société qui les rend handicapés!", souligne Sofia Azaiez, directrice au sein de l'association Lab'ESS, "Les textes de loi prévoyant le respect des droits des personnes handicapées en Tunisie existent, mais sans valeur contraignante. Et ce, en raison du fait que bon nombre de lieux publics ne sont pas accessibles pour les personnes handicapées, les privant ainsi de pouvoir se déplacer librement, d'aller à l’école ou à l’université. L'accès à l'emploi et aux loisirs est limité aussi. C’est alors en les excluant de la sorte, à mon sens, que la société qui les rend handicapés plus que ne le font leurs vrais handicaps physiques."

Lab'ESS, parmi d'autres activités, accompagne les associations dans la réalisation de leurs projets. L'Organisation Tunisienne de défense des droits des personnes handicapées (OTDDPH) en fait partie.

Pour Yousri Mzati, président de l’OTDDPH et Arbi Chouikh membre de cette même association et chercheur en informatique, “C’est une bataille de longue date,” car les lois connaissent des limites d’application.
 L’accès à l’éducation, au marché de l’emploi, aux loisirs, etc. est un chemin parsemé d’obstacles.

Khadija Jallouli, entrepreneure, témoigne du calvaire que constitue le fait de se déplacer quotidiennement. Elle se rappelle de sa première année à la fac: il n’y avait pas de rampe pour qu’elle puisse accéder à l’enceinte de sa faculté. Elle s’est donc dirigée vers le directeur et a demandé à ce qu’on construise un passage pour les personnes à mobilité réduite.

Si la loi garantit les droits des personnes en situation de handicap, l’adaptabilité n’est pas son fort, par exemple, le passage voué aux personnes à mobilité réduite n’est pas toujours mis en place.

La loi 83-2005 stipule que “Toute entreprise publique ou privée employant habituellement 100 travailleurs et plus, est tenue de réserver un taux de 1% au moins des postes de travail pour les personnes handicapées.”

1%, un taux jugé très faible par les défenseurs des droits des personnes handicapées, d’autant plus que la plupart des institutions sont des PME qui emploient moins de 100 personnes. Autre point contraignant pour l’employé en situation de handicap, est que, généralement, les postes ne leur sont pas adaptés, et non pas le contraire, pour manque d’adaptabilité, et dans ce cas, la loi permet aux employeurs de recourir à d’autres alternatives, loin d’être inclusives. (Chapitre 7 de la loi 83-2005) http://www.droit-afrique.com/upload/doc/tunisie/Tunisie-Loi-2005-83-promotion-protection-handicapes.pdf

A l’image des 17 objectifs des Nations-Unies pour le développement durable, l’OTDDPH a élaboré 17 objectifs à atteindre d’ici 2030, une stratégie de 15 ans qui tend à garantir les droits des personnes handicapées et leur procurer une vie digne et autonome dans tous les domaines qui soient (loisirs, sport, éducation, transport, emploi, etc.).

“Pourquoi un malvoyant ne peut-il exercer que le métier de kinésithérapeute ou de standardiste?” se demande Amine Ben Youssef, avocat et docteur en Droit International. La révolution de la dignité n’a pas l’air de servir tous les citoyens au même niveau, commente-t-on. Les négligences existent, tant dans la loi que dans les esprits, et selon Amine Ben Youssef, la solution est d’IMPOSER le respect des droits des personnes handicapées, que le fait de les transgresser soit sanctionné!

Leyla Gasmi, directrice de la ferme thérapeutique GAIA explique, quant à elle que l'“on a beau faire des lois, il n y a personnes pour les appliquer.” C’est dans cette optique qu’elle oeuvre au sein de GAIA, en établissant entre autres un programme d’inclusion pour les personnes handicapées, dans les régions défavorisées, ce qui permet aux jeunes de ces régions d’accéder à la culture, tout en accompagnant les personnes handicapées dans leur démarche.

“Changer les mentalités” est, pour les personnes engagées dans ce combat, l'expression la plus récurrente. L’importance de changer le regard des autres citoyens l’est autant que celui des porteurs de décisions.

“Pour sentir ce que sentent les autres, il faut vivre l’expérience, se mettre à leur place.” Dans le cadre d’un atelier auquel avait participé ce témoin, celui-ci s’est promené avec une canne dans la rue, vivant le handicap et ressentant ce qu’un malvoyant peut ressentir. “C’est ce qui permet de se faire une idée de la situation et d’apporter un regard nouveau de la part des concitoyens”, conclut-il.

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