Prix "Jeune espoir" au 12e concours international de Vivonne en 2011, Hassen Dosss est notamment révélé dans les rôles de Don Basilio dans Les noces de Figaro et du Duc de Mantoue de l’opéra de Verdi, Rigoletto. L’artiste séduit aujourd’hui un public varié à travers ses créations personnelles – comme le titre à succès Chatha –, mêlant le chant lyrique en langue arabe à de multiples influences.
Nous rencontrons le jeune ténor, originaire de Sousse, au lendemain de son concert El Maestro inaugurant le club d’art "Dar el Fan". Quelques jours après l’avoir quitté en salle de spectacle, c’est en sobre scène de répétition que nous retrouvons l’espace. Un lieu polyvalent (salle d’exposition, de représentation et d’apprentissage), à l’image de son fondateur, Maestro, entrepreneur et professeur de chant…
HuffPost Tunisie: Peux-tu nous dire quelques mots sur ce concert El Maestro que tu viens de jouer ?
Hassen Doss: Il s’agit du premier concert réalisé à Dar el Fan. L’espace culturel a été créé depuis octobre et nous comptons y proposer des concerts mensuels variés, avec moi ou d’autres artistes.
El Maestro est un concert acoustique et à l’origine un opéra. On a commencé à produire sur scène ce concert il y a deux ans, il s’agit de la septième représentation. Maintenant nous allons faire évoluer les choses, c’est-à-dire faire tout l’album Dar el Bey puis une tournée, tunisienne d’abord, et pourquoi pas européenne ensuite.
Cette dernière soirée de vendredi était vraiment une réussite: il y avait énormément de monde, les spectateurs étaient très réceptifs !
"El Maestro" signifie le maître, car j’ai d’abord donné ici des cours de chant. Je me produis également avec un chœur – comprenant 15 à 20 chanteurs par groupe – qui était d’ailleurs avec moi sur scène pour la dernière partie. On forme vraiment une équipe que j’aimerais emmener en tournée avec moi plus tard…
On retrouve ce terme "Dar" dans le nom de ton album et pour ton espace…
Oui j’aime ce concept de "Dar", "la maison"! J’aime accueillir des gens chez moi, faire des "brainstormings", réfléchir ensemble à des idées nouvelles. L’idée même de faire ce concert ici est venue comme ça !
Pour ce spectacle, tu étais également accompagné par la pianiste japonaise Toyoko Azayez et la soprano Henda Ben Chaabene. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Ce n’est pas la première fois qu’on se produit ensemble. Henda a commencé le chant avant moi, nous nous sommes rencontrés à l’Institut Supérieur de Musique de Tunis. Toyoko nous a également accompagnés quand nous étions étudiants.
Tu t’entraînes à raison de combien d’heures par jour en moyenne ?
Pour moi, c’est une règle d’or, je fais tous les jours une heure de vocalises, seul ! Je pratique le chant tous les jours mais je fais aussi une heure, voire une heure trente, de boxe ! Le sport est important car le chanteur doit avoir un rythme cardiaque assez élevé, qu’il doit entraîner.
Pour un spectacle comme celui-ci, on s’entraîne deux heures tous les deux jours. L’entraînement se fait de façon régulière car on peut ajouter quelques chansons au répertoire ou apporter quelques changements…
Tu as fait de nombreuses représentations à l’étranger, qu’est-ce que cela te fait d’être en représentation à Tunis ?
Oui, j’étais d’abord à Poitiers, j’ai reçu le prix de jeune espoir au concours de chant "Vienne en Voix", j’ai aussi obtenu mon Master à l’Université de Chant et Théâtre de Munich…
À Tunis, au début, c’était dur, c’était particulier. J’étais un peu l’artiste qui fait quelque chose d’inexistant en Tunisie. Je suis le seul ténor malheureusement, je n’ai pas d’autres "concurrents". C’est vraiment dommage car la concurrence nous pousse à nous améliorer, à travailler plus.
Mais le public tunisien reste très ouvert et chaleureux. En Europe, le public est peut-être plus mûr, alors qu’ici, beaucoup de jeunes sont très réceptifs. D’ailleurs, lors du concert, le public était varié, je pense que c’est une vraie richesse !
La variété de ton public vient aussi du fait que tu ne sois pas un chanteur lyrique classique j’imagine…
Oui, tout à fait, ma musique elle-même est très variée, de Bidoukhal à Chatha ou à Tabaani (NDLR: titres phares de l’artiste), ce sont vraiment des univers complètement différents. C’est pour ça que je suis ravi de réunir deux publics !
Comment t’est venue cette passion pour la musique ? T’es-tu directement orienté vers le registre classique ?
Justement, je voulais faire partie d’un groupe de rock ! Je n’étais pas chanteur au début, je n’ai pas commencé très jeune pour un musicien d’ailleurs, mais à l’âge de 17 ans comme guitariste(rires) ! Je jouais surtout de la guitare électrique,dans un groupe de rock qui s’appelait "Black Land Fire", avec des amis. C’était très cool, on faisait vraiment ça sans but, juste pour le plaisir ! Le diplôme que j’ai obtenu à l’Institut est un diplôme de guitare, pas de chant ! C’est pour ça que je pense ne pas être encore tout à fait "mûr"vocalement, j’ai toujours des choses à retravailler.
Après, j’ai décidé d’être le chanteur du groupe, je faisais beaucoup de fausses notes à cette époque. J’ai démarré le chant dans des registres pop et variété. Mais la transition s’est faite assez rapidement, à 22 ans, j’ai commencé l’opéra, le chant lyrique. J’ai eu le privilège d’avoir deux profs, invités par Mohamed Zine El Abidine, impliqués dans un projet d’opéra en Tunisie. J’ai passé l’audition qui m’a permis d’être repéré. Ils ont vu un avenir prometteur pour moi et ont parlé de succès deux à trois ans après…
Quelle a été la réaction de ta famille ? Tu as été encouragé ?
Au début ce n’était pas le cas. Après le bac, j’ai d’abord étudié à l’Institut de Fiscalité, à Sousse, qui se trouvait juste à côté de l’Institut de Musique. J’étais donc obligé de passer devant tous les jours (rires). Au bout du premier semestre, j’ai laissé tomber pour me réorienter et intégrer l’Institut de Musique ! Durant cette période, ma famille n’était pas de mon côté, je comprends d’ailleurs qu’ils aient eu peur. Quand j’ai commencé à faire mes preuves à l’Institut de Musique, ils ont vu que j’étais brillant, ont compris que c’était ma voie et m’ont soutenu.
On reconnaît des empreintes musicales diverses dans ton travail (arrangements celtiques par exemple), quelles sont tes influences ?
Je suis très ouvert, j’écoute vraiment de tout, du rap à la pop, en passant par l’opéra, beaucoup de rock. James Hetfield (NDLR: chanteur et guitariste du groupe Metallica) et Michael Jackson m’ont donné envie de faire de la musique ! Beyoncé, Jacques Brel et Edith Piaf aussi m’inspirent beaucoup… J’écris toutes mes chansons et je compose les mélodies, je fais ressortir une âme, c’est dans ce sens que Brel m’inspire. Il chante avec son cœur, c’est ce que j’aime, faire passer le ressenti avant la technique !
Que penses-tu de la scène musicale tunisienne actuellement ?
Depuis la révolution, on est en train de bouger, plein de choses se passent. Même au niveau du rap, on trouve maintenant d’excellents rappeurs tunisiens. Il y a maintenant des chanteurs engagés, ce qui n’était pas le cas avant. Ça reste un début, mais le bouillonnement actuel annonce de bonnes choses !
Avec qui aimerais-tu éventuellement collaborer à l’avenir ?
Je suis ouvert à toute collaboration. Même avec un artiste pour lequel je n’ai pas forcément de coup de cœur, la chanson peut être bonne ! C’est ça la musique ! C’est un terrain de partage, l’harmonie peut se créer.
Tu as fait plusieurs clips avec tes morceaux ; le clip de Chatha en 2013 a notamment suscité de nombreuses réactions. Comment choisis-tu les thèmes ?
Je ne choisis pas mes thèmes, je vis d’abord une expérience humaine. Les choses viennent naturellement, je m’assieds au piano ou avec ma guitare et tout sort ! Je ne fais aucune autocensure, je laisse ma musique telle quelle.
Par rapport à la réception du public, je suis conscient que cela peut ne pas plaire à tout le monde. D’ailleurs je suis content quelque part que ça ne fasse pas l’unanimité. Mais depuis deux ou trois ans, le public semble plus réceptif à la particularité de mon style.
Tu passes des planches de l’opéra au clip. Comment s’est faite cette transition ?
A la fin de mes études à Munich, je suis rentré et j’ai décidé de faire ma musique, mon album, c’était mon objectif ultime. J’ai voulu faire quelque chose de moins académique, de plus libre. J’avais envie de chanter sur scène et en tunisien surtout, de partager ma culture, car c’est ma richesse.
Quels sont tes projets ?
Actuellement, je me concentre sur l’album que j’espère finir fin mars. J’ai déjà des invitations pour les festivals d’été. Pour l’instant je reste en Tunisie donc et peut-être à l’étranger dans un ou deux ans.
Nous rencontrons le jeune ténor, originaire de Sousse, au lendemain de son concert El Maestro inaugurant le club d’art "Dar el Fan". Quelques jours après l’avoir quitté en salle de spectacle, c’est en sobre scène de répétition que nous retrouvons l’espace. Un lieu polyvalent (salle d’exposition, de représentation et d’apprentissage), à l’image de son fondateur, Maestro, entrepreneur et professeur de chant…
"James Hetfieldet Michael Jackson m’ont donné envie de faire de la musique !"
HuffPost Tunisie: Peux-tu nous dire quelques mots sur ce concert El Maestro que tu viens de jouer ?
Hassen Doss: Il s’agit du premier concert réalisé à Dar el Fan. L’espace culturel a été créé depuis octobre et nous comptons y proposer des concerts mensuels variés, avec moi ou d’autres artistes.
El Maestro est un concert acoustique et à l’origine un opéra. On a commencé à produire sur scène ce concert il y a deux ans, il s’agit de la septième représentation. Maintenant nous allons faire évoluer les choses, c’est-à-dire faire tout l’album Dar el Bey puis une tournée, tunisienne d’abord, et pourquoi pas européenne ensuite.
Cette dernière soirée de vendredi était vraiment une réussite: il y avait énormément de monde, les spectateurs étaient très réceptifs !
"El Maestro" signifie le maître, car j’ai d’abord donné ici des cours de chant. Je me produis également avec un chœur – comprenant 15 à 20 chanteurs par groupe – qui était d’ailleurs avec moi sur scène pour la dernière partie. On forme vraiment une équipe que j’aimerais emmener en tournée avec moi plus tard…
On retrouve ce terme "Dar" dans le nom de ton album et pour ton espace…
Oui j’aime ce concept de "Dar", "la maison"! J’aime accueillir des gens chez moi, faire des "brainstormings", réfléchir ensemble à des idées nouvelles. L’idée même de faire ce concert ici est venue comme ça !
Pour ce spectacle, tu étais également accompagné par la pianiste japonaise Toyoko Azayez et la soprano Henda Ben Chaabene. Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Ce n’est pas la première fois qu’on se produit ensemble. Henda a commencé le chant avant moi, nous nous sommes rencontrés à l’Institut Supérieur de Musique de Tunis. Toyoko nous a également accompagnés quand nous étions étudiants.
Tu t’entraînes à raison de combien d’heures par jour en moyenne ?
Pour moi, c’est une règle d’or, je fais tous les jours une heure de vocalises, seul ! Je pratique le chant tous les jours mais je fais aussi une heure, voire une heure trente, de boxe ! Le sport est important car le chanteur doit avoir un rythme cardiaque assez élevé, qu’il doit entraîner.
Pour un spectacle comme celui-ci, on s’entraîne deux heures tous les deux jours. L’entraînement se fait de façon régulière car on peut ajouter quelques chansons au répertoire ou apporter quelques changements…
Tu as fait de nombreuses représentations à l’étranger, qu’est-ce que cela te fait d’être en représentation à Tunis ?
Oui, j’étais d’abord à Poitiers, j’ai reçu le prix de jeune espoir au concours de chant "Vienne en Voix", j’ai aussi obtenu mon Master à l’Université de Chant et Théâtre de Munich…
À Tunis, au début, c’était dur, c’était particulier. J’étais un peu l’artiste qui fait quelque chose d’inexistant en Tunisie. Je suis le seul ténor malheureusement, je n’ai pas d’autres "concurrents". C’est vraiment dommage car la concurrence nous pousse à nous améliorer, à travailler plus.
Mais le public tunisien reste très ouvert et chaleureux. En Europe, le public est peut-être plus mûr, alors qu’ici, beaucoup de jeunes sont très réceptifs. D’ailleurs, lors du concert, le public était varié, je pense que c’est une vraie richesse !
La variété de ton public vient aussi du fait que tu ne sois pas un chanteur lyrique classique j’imagine…
Oui, tout à fait, ma musique elle-même est très variée, de Bidoukhal à Chatha ou à Tabaani (NDLR: titres phares de l’artiste), ce sont vraiment des univers complètement différents. C’est pour ça que je suis ravi de réunir deux publics !
Comment t’est venue cette passion pour la musique ? T’es-tu directement orienté vers le registre classique ?
Justement, je voulais faire partie d’un groupe de rock ! Je n’étais pas chanteur au début, je n’ai pas commencé très jeune pour un musicien d’ailleurs, mais à l’âge de 17 ans comme guitariste(rires) ! Je jouais surtout de la guitare électrique,dans un groupe de rock qui s’appelait "Black Land Fire", avec des amis. C’était très cool, on faisait vraiment ça sans but, juste pour le plaisir ! Le diplôme que j’ai obtenu à l’Institut est un diplôme de guitare, pas de chant ! C’est pour ça que je pense ne pas être encore tout à fait "mûr"vocalement, j’ai toujours des choses à retravailler.
Après, j’ai décidé d’être le chanteur du groupe, je faisais beaucoup de fausses notes à cette époque. J’ai démarré le chant dans des registres pop et variété. Mais la transition s’est faite assez rapidement, à 22 ans, j’ai commencé l’opéra, le chant lyrique. J’ai eu le privilège d’avoir deux profs, invités par Mohamed Zine El Abidine, impliqués dans un projet d’opéra en Tunisie. J’ai passé l’audition qui m’a permis d’être repéré. Ils ont vu un avenir prometteur pour moi et ont parlé de succès deux à trois ans après…
Quelle a été la réaction de ta famille ? Tu as été encouragé ?
Au début ce n’était pas le cas. Après le bac, j’ai d’abord étudié à l’Institut de Fiscalité, à Sousse, qui se trouvait juste à côté de l’Institut de Musique. J’étais donc obligé de passer devant tous les jours (rires). Au bout du premier semestre, j’ai laissé tomber pour me réorienter et intégrer l’Institut de Musique ! Durant cette période, ma famille n’était pas de mon côté, je comprends d’ailleurs qu’ils aient eu peur. Quand j’ai commencé à faire mes preuves à l’Institut de Musique, ils ont vu que j’étais brillant, ont compris que c’était ma voie et m’ont soutenu.
On reconnaît des empreintes musicales diverses dans ton travail (arrangements celtiques par exemple), quelles sont tes influences ?
Je suis très ouvert, j’écoute vraiment de tout, du rap à la pop, en passant par l’opéra, beaucoup de rock. James Hetfield (NDLR: chanteur et guitariste du groupe Metallica) et Michael Jackson m’ont donné envie de faire de la musique ! Beyoncé, Jacques Brel et Edith Piaf aussi m’inspirent beaucoup… J’écris toutes mes chansons et je compose les mélodies, je fais ressortir une âme, c’est dans ce sens que Brel m’inspire. Il chante avec son cœur, c’est ce que j’aime, faire passer le ressenti avant la technique !
Que penses-tu de la scène musicale tunisienne actuellement ?
Depuis la révolution, on est en train de bouger, plein de choses se passent. Même au niveau du rap, on trouve maintenant d’excellents rappeurs tunisiens. Il y a maintenant des chanteurs engagés, ce qui n’était pas le cas avant. Ça reste un début, mais le bouillonnement actuel annonce de bonnes choses !
Avec qui aimerais-tu éventuellement collaborer à l’avenir ?
Je suis ouvert à toute collaboration. Même avec un artiste pour lequel je n’ai pas forcément de coup de cœur, la chanson peut être bonne ! C’est ça la musique ! C’est un terrain de partage, l’harmonie peut se créer.
Tu as fait plusieurs clips avec tes morceaux ; le clip de Chatha en 2013 a notamment suscité de nombreuses réactions. Comment choisis-tu les thèmes ?
Je ne choisis pas mes thèmes, je vis d’abord une expérience humaine. Les choses viennent naturellement, je m’assieds au piano ou avec ma guitare et tout sort ! Je ne fais aucune autocensure, je laisse ma musique telle quelle.
Par rapport à la réception du public, je suis conscient que cela peut ne pas plaire à tout le monde. D’ailleurs je suis content quelque part que ça ne fasse pas l’unanimité. Mais depuis deux ou trois ans, le public semble plus réceptif à la particularité de mon style.
Tu passes des planches de l’opéra au clip. Comment s’est faite cette transition ?
A la fin de mes études à Munich, je suis rentré et j’ai décidé de faire ma musique, mon album, c’était mon objectif ultime. J’ai voulu faire quelque chose de moins académique, de plus libre. J’avais envie de chanter sur scène et en tunisien surtout, de partager ma culture, car c’est ma richesse.
Quels sont tes projets ?
Actuellement, je me concentre sur l’album que j’espère finir fin mars. J’ai déjà des invitations pour les festivals d’été. Pour l’instant je reste en Tunisie donc et peut-être à l’étranger dans un ou deux ans.
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