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Tunisie: Et si on se passait du FMI?, La question a été au coeur d'un débat à la Foire du livre

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Le recours aux financements du Fonds Monétaire International (FMI) n’est pas une fatalité, d’autres alternatives se présentent pour les pays à revenus intermédiaires, tels que la Tunisie et les diktats qu’imposerait cette institution à plusieurs pays ne sont pas indiscutables, c’est ce qui ressort du débat, tenu dimanche, sur le thème "Quelles alternatives économiques face aux conditions contraignantes du FMI ?", dans le cadre de la foire internationale du livre de Tunis.

Le thème est au centre d’un débat politique en Tunisie où le recours aux interventions de cette institution de Bretton Woods date de plusieurs décennies, mais la plus importante remonte à la fin des années 80 avec le Programme d’ajustement structurel (PAS), a noté Taoufik Ben Abdallah, coordinateur du forum social africain, en introduisant le débat.

Les interventions du FMI qui visent en particulier à rééquilibrer la balance des paiements extérieurs et à favoriser la maîtrise des dépenses publiques sont jugées nécessaires par les-uns et critiquées par les autres, lesquels considèrent qu’elles ne concernent que le court terme, ne favorisant pas la réalisation des objectifs de développement, a-t-il ajouté.

Pour Hakim Ben Hamouda, ancien ministre de l’économie et des finances au gouvernement Jomâa, le FMI est une institution financière qui a perdu de sa superbe même s’il continue à jouer un rôle important sur la scène financière internationale.


Le FMI fait partie des institutions anciennes et n’a plus le même poids qu’auparavant, notamment par rapport au contexte de sa création au lendemain de la 2ème guerre mondiale, a-t-il dit, évoquant les changements survenus dans le monde, essentiellement l’émergence de nouvelles puissances économiques, à l’instar de la Chine, l’entrée sur la scène internationale des mouvements sociaux et la montée de la société civile ou encore la présence de nouvelles institutions financières internationales, telles que la BAD, la BID et autres.

Se référant à son expérience dans les négociations avec le FMI lorsqu’il était ministre, Ben Hamouda a souligné l’importance de bien se préparer à ce genre d’exercices en ayant une vision et des priorités claires ainsi que des alternatives, tout en étant prêts à tous les résultats, y compris celui de ne pas aboutir à un accord.

Pour Moussa Dembelle économiste et activiste sénégalais, le FMI qui est l’expression de l’hégémonie de certains pays occidentaux ne s’accommode qu’avec les régimes autocratiques où les décisions sont prises à sens unique, imposant la limitation des dépenses sociales. C’est une institution discréditée qui reflète un capitalisme en crise de légitimité a-t-il dit, notant que le poids de la Chine, de l’Inde et du Brésil n’est pas reflété dans le fonds.


En effet, les cinq pays du Brics ont créé une banque de développement qui aura comme capital 100 milliards de dollars et qui aura comme siège Shanghaï. Contrairement au FMI et à la Banque mondiale, les prêts faits ne seraient pas assortis de conditions contraignantes (ajustement structurel). Ces pays cherchent, à travers cette banque de développement à créer un système alternatif aux institutions dominées par les nations occidentales. Une option qui pourrait séduire nombre de pays émergents qui estiment que les conditions du FMI sont rigides, a expliqué l'intervenant.

Rôle ambigu du FMI?

Pour des pays qui aspirent à une transition démocratique et à la dignité, telle que la Tunisie, il est important de réhabiliter cette dignité ainsi que la justice sociale et la lutte contre les inégalités, a indiqué Dembelle. L’Etat n’a pas seulement un rôle à jouer, il a aussi une responsabilité vis-à-vis de ses citoyens, a-t-il ajouté, faisant remarquer que les pays africains peuvent se passer du FMI.

Optant pour une lecture historique du fonctionnement du FMI, Ernest Wolf, journaliste allemand spécialiste en marchés financiers a mis l’accent sur la corrélation entre cette institution et l’hégémonie économique américaine qui s’est traduite notamment par l’imposition du dollar en tant que monnaie internationale après la décision du Président Américain Nixon en 1971 de fermer le guichet de l’or. Peu après, l’Arabie saoudite, un des principaux pays producteurs du pétrole a décidé, dans le cadre d’un marché conclu avec les Américains, de ne vendre son pétrole qu’en dollars. Laquelle décision a été généralisée dans le cadre de l’OPEP.

Cette politique financière a abouti à un développement important des marchés financiers au détriment de l’économie réelle, d’où notamment la multiplication des crises financières internationales dont celle survenue en 2008, a ajouté ce journaliste, auteur d’un livre sur les marchés financiers.

A noter que le penseur égyptien altermondialiste Samir Amine qui devait faire partie des intervenants à ce débat, selon le programme des manifestations élaboré par la foire, s’est absenté. Il n’a pas pu faire le déplacement en Tunisie pour des raisons de santé, a indiqué le service communication de la foire internationale du livre de Tunis qui se tient du 24 mars au 2 avril 2017.

Une délégation du FMI attendue cette semaine à Tunis

"Une délégation du FMI est attendue, fin mars à Tunis, pour discuter du processus de mise en œuvre des réformes", a annoncé la ministre des Finances, Lamia Zribi, l’agence TAP.

En attendant le déblocage de la deuxième et troisième tranche du prêt (estimées à 700 millions de dollars) lors de cette visite, le Fonds monétaire international a validé en mai 2016, l’octroi d’un crédit de 2,9 milliards de dollars à la Tunisie.

La Tunisie a jusque-là obtenu 320 millions de dollars à titre de première tranche, alors que le reste du montant sera versé en plusieurs tranches en fonction de l’avancement de l’exécution du programme de réforme économique défini.

La Tunisie face aux défis

D'après un communiqué publié par le FMI en février 2017, l’économie tunisienne continue de faire preuve de résilience dans une conjoncture nationale et internationale difficile. Le taux de croissance devrait rebondir à 2,5 % en 2017, contre 1,3 % en 2016, impulsé par le regain de confiance suscité par la réussite de la conférence Tunisia 2020 en novembre dernier et par l’adoption de textes de loi essentiels liés au secteur privé.

"De redoutables défis macroéconomiques subsistent. La dette publique a continué de s’alourdir, dépassant 60 % du PIB en 2016. Les mesures adoptées par les autorités dans le cadre de la loi de finances de 2017 réduiront le déficit budgétaire global de manière modeste à 5,6 % du PIB, contre une estimation de 6 % en 2016, niveau supérieur à l’objectif visé initialement dans le cadre du MEDC, en raison d’une croissance plus faible et de dérapages de la politique budgétaire."

La masse salariale de la fonction publique en pourcentage du PIB est parmi les plus élevées au monde et le déficit des transactions courantes reste considérable.

Les priorités à entreprendre

Parmi les priorités à court terme évoquées par le FMI figurent "une plus grande mobilisation des recettes fiscales de manière juste et efficiente, la rationalisation de la masse salariale du secteur public afin de dégager une plus grande marge de manœuvre en faveur des investissements publics, et la mise en place du mécanisme d’ajustement des prix des carburants".

Les mesures destinées à assurer la viabilité du système de sécurité sociale représentent une autre priorité importante. "Ces initiatives sont vitales pour faire en sorte que l’économie tunisienne connaisse une croissance plus forte et crée davantage d’emplois et pour veiller à ce que tous les Tunisiens continuent à bénéficier de services de base adéquats," estime le FMI dans son communiqué.

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