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Portait de Sahar, une réalisatrice qui tend à déconstruire les stéréotypes du cinéma tunisien

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Sahar El Euchi, une jeune cinéaste qui cherche sa voie, tout y berçant depuis l'enfance. En effet, son chemin, elle l'a emprunté presque malgré elle. Fille de deux passionnés de cinéma, actifs à la Fédération Tunisienne des Cinés Clubs FTCC, le 7ème art, elle est née dedans. Avec ses parents, elle ne ratait pas le festival International du Film Amateur de Kélibia (FIFAK) plus tard, elle y retournait avec ses amis cinéphiles et cinéastes habités par le même engouement pour ce festival.

Le FIFAK est pour elle plus qu'un festival, une école, affirme-t-elle au HuffPost Tunisie. Cette année elle y est retournée comme à l'accoutumée mais cette fois-ci, non seulement comme festivalière, mais pour recevoir une distinction du jury pour son premier court métrage "Mutation".

Tout en étant l'enfant prodige de la FTCC et de la Fédération Tunisienne des Cinéastes Amateurs (FTCA), Sahar se rebelle contre cela pour tracer son propre parcours: "Ces institutions m'ont beaucoup appris; dans la première, j'étais initiée au débat cinématographique, dans la deuxième, à la façon de faire des films, entre eux j'ai évolué mais je ne me sentais pas libre, empoisonnée par l'idéologie". Elle reste toutefois proche de ce monde en intégrant l'association tunisienne de critique cinématographique.

Cette passionnée de Almodóvar et de Tarkovski, de Vincent Gallo, entre autres, prend du recul mais jamais de distance, elle ne coupe pas le cordon ombilical qui la lie au cinéma. Elle décide d'étudier le design graphique mais son coeur est toujours rattaché à l'image: "Je n'ai pas voulu demeurer l'otage de ma passion mais ouvrir mes horizons, brasser large. Le design graphique, tout en m'ouvrant à d'autres perspectives plus prometteuses pour la recherche, le travail, il me maintient dans l'univers de l'image".

C'est à la faculté de Beaux-Arts d'ailleurs qu'elle enfantait son premier court métrage dans le cadre de sa soutenance de master. D'habitude travaillant sur la photo, l'affiche, Sahar opte pour un court métrage, un choix inédit. La jeune femme a réussi à faire le film sans moyens avec la solidarité d'amis qui ont travaillé pour elle bénévolement.

Et cette fois-ci encore la jeune femme avait choisi la rébellion: "Mon film traite de l'image du militant post 14 janvier, je tenais à mettre en exergue les stéréotypes le concernant. J'ai constaté que le militant à l'époque de Ben Ali était politique, aujourd'hui on l'appelle un activiste de la société civile pour désigner une diversité de parcours et de combats; un fourre-tout déconcertant".

Et la jeune femme porte un regard critique sur une tendance cinématographique qui "simplifie la révolution, la réduit à des slogans puérils avec des images monotones sur la femme tunisienne en quête de liberté à travers l'alcool, le sexe, etc", en parlant de "À peine j'ouvre les yeux"de Leila Bouzid, entre autres.

"Je trouve qu'on a un manque d'idées profondes. L'idée est la matrice du scénario, or nos idées sont superficielles, pas assez recherchées et ce par paresse ou par facilité ou parce qu'on n'a cure du spectateur tunisien et qu'on fait juste des films pour l'étranger".

La jeune femme tend à briser "l'ordre établi" et aspire à initier une nouvelle vague à l'image de La Nouvelle vague du cinéma français, entamée à la fin les années 50 avec une poignée de réalisateurs comme François Truffaut, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol, Éric Rohmer.

Sahar commence à rassembler sa troupe. Avec son compagnon de route Rami Jarboui: "On va alterner, on tourne un film pour moi et un pour lui. Toujours ensemble car on partage la même vision des choses". Si les moyens leur manquent, la volonté est bien là. Le résultat est jusque-là prometteur, "Mutation" de Sahar rafle les prix, le dernier au festival de cinéma de Gabes, son film a été projeté plusieurs fois (IFT, festival Ta7rik, La nuit des courts métrages tunisien à Paris, etc) et celui de Rami, "La soupe" vient d'être sacré Lauréat du Grand Prix international du Mobile Film Festival de Paris.

Un avenir prometteur pour Sahar et son compagnon de route.







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